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Dentexia : des victimes et des interrogations

Rappelons les faits : près de 2000 personnes ont confié à cette institution la remise en état de leur dentition et ont la plupart du temps payé les prestations avant qu’elles ne soient terminées, en souscrivant éventuellement un emprunt affecté pour cela. Mais DENTEXIA a dû cesser brutalement son activité, laissant ces personnes sur le carreau, sans solution. En effet, il est à peu près certain que la liquidation n’apportera pas suffisamment d’argent pour indemniser les clients floués, et aussi les fournisseurs.

Mais pourquoi ces patients grugés étaient-ils allés s’adresser aux Centres dentaires DENTEXIA plutôt que chez leurs dentistes traditionnels ? Pour une question de coût, tout simplement. Entre 30 et 60% moins cher que les tarifs professionnels : de quoi faire réfléchir ! La Sécurité Sociale et les complémentaires ne couvrent souvent que très mal les travaux dentaires importants. L’occasion, pour des gens à revenus modestes, d’accéder à ce genre de soins. Et puis, ces Centres, créés depuis quelques années, avaient pignon sur rue, étaient déclarés aux autorités, et semblaient bien équipés.

A y regarder de plus près, la situation administrative de cette institution était pour le moins bizarre : statut d’association, dépendance forte de sociétés parallèles détenues par un actionnaire plutôt sulfureux ayant déjà eu maille à partir avec la justice… Mais le consommateur lambda se renseigne t-il toujours sur la situation d’un vendeur qui lui fait une offre intéressante ? Non, bien sûr.

Comme dans toute profession bien établie, les praticiens « classiques », sentant venir une concurrence inhabituelle à bas prix, sont montés au créneau très vite, défendant pour leur compte une qualité de prestation et un suivi qui justifiait leurs tarifs élevés. Dénonciations des pratiques douteuses de ces nouveaux venus, actions judiciaires, peut-être aussi pression sur les fournisseurs d’implants : les tentatives de déstabilisation n’ont pas manqué. Ont-elles provoqué la chute ? Difficile à dire.

L’UFC Que Choisir a toujours fait la promotion de la concurrence, s’opposant, à chaque fois que cela semblait possible, aux pratiques des monopoles réels ou de fait, générateurs de tarifs élevés non justifiés, dont les consommateurs faisaient les frais. Et il faut admettre que les prothèses dentaires, à l’instar des lunettes, sont particulièrement chères. Mais par ailleurs, l’association a toujours informé le public des risques éventuels que l’on prenait à sortir des sentiers battus, à confier son argent, et sa santé à des professionnels mal connus, et dans des conditions contractuelles peu favorables. Cela a été le cas dans de nombreux domaines de la consommation. Mais les prix sont libres, et chacun est libre de ses choix.

Que se passera t-il pour DENTEXIA ? Difficile de le dire. Il est probable que les actionnaires, directs ou indirects, seront condamnés pour leur mauvaise gestion, des détournements de fonds, et écoperont de sanctions pénales (amendes, interdictions d’exercer, peut-être plus grave encore). Cela changera t-il quelque chose ? Pas sûr. Les victimes se sont signalées auprès d’une association qui a sollicité l’intervention financière des pouvoirs publics et des assurances, sans résultat jusqu’alors. Elles veulent être soignées, mais ne pas payer deux fois des prestations. Les professionnels établis, s’ils acceptent d’essayer de réparer les dégâts, n’ont aucune envie de le faire gratuitement ! D’aucuns ont évoqué la possibilité d’une véritable action de groupe. Dans l’état actuel de la législation et des procédures, elle semble particulièrement hasardeuse, même menée par une association de consommateurs ; son résultat financier potentiel, s’agissant d’une entreprise ayant disparu, risque d’être nul. Et il faudrait plusieurs années pour en arriver là ! Les patients sauront-ils attendre ?

Nous souhaitons bien sûr qu’une solution émerge des discussions en cours, et que les victimes puissent trouver une porte de sortie honorable à leur douleur du moment. Mais cet exemple malheureux doit aussi orienter les réflexions des consommateurs et des professionnels en général : Certains soins ne sont-ils pas vraiment trop chers ? Les assurances santé (Sécurité Sociale et Mutuelles) n’ont-elles pas des tarifs de remboursement mal adaptés engendrant des excès là où il y a de l’argent à faire ? Les patients ne doivent-ils pas être mieux informés, avoir plus de possibilités de se retirer d’un processus en cours qui leur semble dangereux, et d’obtenir des indemnisations correctes sans devoir passer devant un juge ? Peut-on laisser des organismes financiers peu regardants confier le placement de leurs crédits à des vendeurs peu recommandables et ne pas au moins vérifier que les prestations sont bien exécutées avant les versements ?

Les réponses sont dans les questions !